Venezuela: Maduro organise de vastes exercices militaires en pleine tension

Caracas – Le Venezuela a lancé vendredi des exercices militaire « sans précédent » sous l’impulsion de son président Nicolas Maduro confronté à son plus important mouvement de contestation depuis son arrivée au pouvoir, une crise que tentent d’apaiser des médiateurs internationaux.

La fièvre est brusquement montée ces derniers jours dans un Venezuela en pleine crise économique, politique et sociale, politique et sociale où le président Maduro a décrété l’état d’exception qui lui accorde des pouvoirs accrus en matière de sécurité, de distribution alimentaire et énergétique.

C’est dans le cadre de cet état d’exception, rejeté par le Parlement, où l’opposition est majoritaire, que 519.000 militaires et miliciens effectuaient des exercices durant deux jours, le président socialiste prétextant une « intervention extérieure » visant à le déloger du pouvoir.

L’armée vénézuélienne avait déjà procédé à des exercices de défense en mars 2015, mais d’une ampleur moindre avec quelque 100.000 hommes, lorsque le président américain Barack Obama avait décrété que le pays sud-américain était une « menace » pour la sécurité des Etats-Unis.

Le gouvernement « veut procéder à de grands déploiements militaires pour que les gens aient peur (…) Le faire avec le prétexte d’une menace extérieure est une bonne façon de montrer ses muscles« , a expliqué à l’AFP l’analyste Benigno Alarcon.

« Cet exercice n’est pas fait pour provoquer une inquiétude quelconque dans le pays« , a répondu le ministre de la Défense Vladimir Padrino Lopez, qui a répété que le « Venezuela était menacé en ce moment« . Il s’agira d’exercices « sans précédent« , selon lui, qui impliquent 160.000 soldats et des centaines de milliers de réservistes et partisans armés.

– ‘Soulèvement militaire dans l’air’ –

Le rôle de l’armée vénézuélienne sera déterminant dans cette crise, estiment des experts. Pour l’opposant Henrique Capriles, défait de peu par M. Maduro lors du scrutin présidentiel de 2013, un « soulèvement militaire » est même « dans l’air » au pays.

Après plusieurs jours d’escalade, d’anciens chefs de gouvernement étrangers, dont l’Espagnol José Luis Rodriguez Zapatero, ont tenté de faire retomber la pression à l’issue des réunions à Caracas avec l’opposition antichaviste et le chef de l’Etat vénézuélien, successeur du défunt président Hugo Chavez.

« Ce sera long, compliqué et difficile, mais c’est le chemin que doit emprunter le Venezuela, celui du dialogue national qui devra aborder les problèmes sociaux, économiques, institutionnels, de cohabitation pacifique, de libertés« , a déclaré M. Zapatero, qui conduit cette délégation à la demande de l’Union des nations sud-américaines (Unasur). Les deux parties ont manifesté leur « volonté » d’échanger, a-t-il souligné.

Le Chili, l’Argentine et l’Uruguay ont eux appelé à un « dialogue politique urgent » pour dénouer la crise au Venezuela, pays doté des premières ressources pétrolières au monde mais frappé par une inflation de 180,9% (le FMI prévoit 700% en 2016), la plus élevée au monde, un recul du PIB (-5,7%), et des finances publiques dans le rouge car très dépendante des cours du brut.

« Le dialogue avec un accompagnement international doit avoir lieu » mais « la solution à la crise passe par l’organisation d’un référendum révocatoire« , pour destituer Nicolas Maduro, a déclaré vendredi Enrique Marquez, le vice-président du Parlement, où l’opposition est majoritaire.

De son côté, le président Maduro a dit espérer jeudi soir que le dialogue fasse cesser « l’attitude de coup d’Etat » de la coalition d’opposition, la Table de l’unité démocratique (MUD).

– Commerces pillés –

Le bras de fer entre chavistes et antichavistes s’est intensifié depuis que l’opposition a rassemblé début mai environ 1,8 million de signatures pour lancer le processus du référendum de destitution, une initiative à laquelle les autorités ont opposé une fin de non-recevoir, même si la commission électorale doit encore se prononcer officiellement.

Les antichavistes, qui espèrent l’organiser d’ici fin 2016 et qui accusent les autorités de jouer la montre, sont descendus mercredi dans la rue pour accélérer le calendrier mais les manifestations ont été réprimées.

Si ces défilés n’ont pas été massivement suivies, la tension sociale au Venezuela peut se mesurer à la taille des files d’attente devant les commerces, où règne la pénurie. Des habitants de Valencia (centre) ont même fait état de commerces pillés, ce qui n’avait pas été confirmé par les autorités.