Paris – Le lancement par Emmanuel Macron d’un mouvement « ni à droite, ni à gauche » était bien reçu surtout à droite jeudi, Jean-Pierre Raffarin allant même jusqu’à l’imaginer en Premier ministre d’Alain Juppé, Manuel Valls jugeant de son côté « absurde » de vouloir gommer les clivages partisans.
L’hebdomadaire Le Point rapporte cette semaine une déclaration de Jean-Pierre Raffarin (Les Républicains), soutien d’Alain Juppé pour 2017, lors d’une conférence à l’European Business School: « le meilleur Premier ministre d’un président de droite modérée, ce serait Emmanuel Macron« .
L’enthousiasme de l’ancien Premier ministre n’était pas retombé jeudi, au lendemain du lancement par M. Macron de son mouvement politique transpartisan « En Marche! » lors d’une réunion publique à Amiens. « Il n’y a pas d’incompatibilité entre les sensibilités, les deux tempéraments, les deux cultures, je trouve. Qu’il y ait, dans l’avenir, des partenariats, je ne sais sous quelle forme, ça ne me paraît pas impossible« , a-t-il ajouté sur France 2.
Alain Juppé lui-même a estimé à propos du ministre de l’Economie mi-février qu’il valait « mieux être dans un gouvernement de droite que dans un gouvernement de gauche pour faire valoir des idées de droite« .
Nathalie Kosciusko-Morizet (Les Républicains) a qualifié d' »intéressant » le lancement d' »En Marche!« . « J’ai l’impression d’avoir lancé un prototype et qu’il est en train de devenir bi-réacteurs« , a-t-elle lancé sur i-Télé. Avant d’ajouter aussitôt: « se déclarer libre, disponible pour pouvoir travailler avec les Français (…), et en même temps, se placer clairement derrière le chef de meute, en quelque sorte, c’est vraiment paradoxal« .
Manuel Valls a commenté pour sa part jeudi à Metz qu' »il serait absurde de vouloir effacer » les différences entre droite et gauche.
Mais, a-t-il nuancé, « nous savons aussi que ces perceptions ont changé, que les différences se sont estompées et parfois même elles ne sont pas perçues par nos concitoyens« . « C’est pourquoi nous devons être capables de dépasser les clivages partisans et de nous situer au-dessus des petites querelles« , a-t-il poursuivi.
Quant à François Hollande, dont l’entourage assure qu’il était au courant du lancement de ce mouvement, il s’est montré laconique: « un ministre qui veut dialoguer avec les citoyens, ça s’appelle faire de la politique et faire en sorte que des convictions puissent être partagées« .
– La « grande confiance » du chef de l’Etat –
Le chef de l’Etat a « une grande confiance » en lui, et « tout ce qui participe du succès de l’exécutif et de la politique que nous menons va dans le bon sens« , a insisté son entourage.
Reste que le centriste Jean-Christophe Lagarde a reconnu jeudi qu’Emmanuel Macron était « parfaitement compatible avec l’UDI. Mais il se trouve coincé dans un paradoxe: à chaque fois qu’il dit quelque chose d’intéressant, son gouvernement lui dit de la fermer« .
L’enthousiasme était moins évident à gauche. Le premier secrétaire du PS Jean-Christophe Cambadélis a tancé le ministre: « s’il contribue à élargir la majorité, son apport est positif » mais « s’il veut changer le centre de gravité de la gauche, il fait fausse route« , a-t-il averti.
Même le député PS réformateur Christophe Caresche, soutien de l’exécutif, s’est montré circonspect. « Ce n’est pas en additionnant des stratégies contradictoires qu’on peut construire une ligne cohérente« , a-t-il déclaré à l’AFP.
Les réactions sont encore plus hostiles à la gauche de la gauche, alors que le projet de loi sur le travail continue de susciter l’opposition.
M. Macron « est quelqu’un qui pense que la précarisation du salariat est l’avenir de nos sociétés, je ne le crois pas. Le ni-droite ni gauche, c’est une mode qu’il enfourche et qui est toujours en fait le masque de ceux qui finiront à droite et qui mènent des politiques de droite« , a jugé le secrétaire national du PCF, Pierre Laurent.
« Les gens qui ont mis en panne tout le système et l’économie du pays et qui font un truc qui s’appelle +En Marche+, ça me fait rire« , a renchéri Jean-Luc Mélenchon (Parti de gauche).
Macron, « c’est l’imposture de la modernité dans une course à l’échalote à qui sera le plus moderne mais sur le fond c’est une vision archaïque, ringarde de la société et des solutions pour s’en sortir« , a de son côté analysé David Cormand, secrétaire national d’Europe Ecologie-Les Verts.