Indianapolis (Etats-Unis) – Le président élu Donald Trump a prévenu jeudi que les entreprises américaines délocalisant pour élaguer leurs coûts de production en subiraient « les conséquences », lors d’une visite dans une usine de l’Indiana qui vient de renoncer à un tel projet en échange d’avantages financiers.
« Les entreprises ne vont pas continuer à quitter les Etats-Unis sans qu’il y ait des conséquences. C’est fini ça. C’est fini« , a lancé M. Trump, dans une usine du fabricant de climatiseurs Carrier dont il affirme avoir sauvé plus de 1.000 emplois en empêchant un transfert d’activité vers le Mexique. « Quitter le pays va être très, très difficile » pour les entreprises, a-t-il prévenu.
Elu sur la promesse de sauvegarder les emplois ouvriers sur le sol américain, il a choisi de se rendre dans cette usine devenue cette semaine le symbole de la politique anti-délocalisations qu’il entend mener.
Carrier a annoncé mardi renoncer à son projet de délocalisation, affirmant sur Twitter avoir « conclu un accord avec le président élu« . Puis, dans un communiqué, elle a précisé que les « incitations proposées par l’Etat (de l’Indiana) ont joué un rôle important » dans sa décision.
« L’Etat de l’Indiana a offert à Carrier un package pluri-annuel de 7 millions de dollars, assorti de conditions en matière d’emploi, de maintien des postes de travail et d’investissement financier« , a précisé jeudi la filiale du géant United Technologies.
Selon les médias américains, elle va bénéficier d’allègements fiscaux pendant dix ans.
Cette visite était la première étape de la « tournée de la victoire » de Donald Trump et de son vice-président Mike Pence –également gouverneur de l’Indiana– dans les Etats industriels qui ont voté pour le duo républicain le 8 novembre.
« J’ai hâte d’aller dans l’Indiana aux côtés des ouvriers de Carrier qui sont super. Ils vont vendre beaucoup de climatiseurs!« , avait tweeté le milliardaire avant de s’envoler pour cette ville du nord des Etats-Unis.
– Goutte d’eau –
Mais les postes sauvegardés ne représentent qu’une goutte d’eau au regard des emplois industriels perdus, a tweeté l’économiste Paul Krugman. Selon lui, il faudrait un accord similaire par semaine pendant quatre ans pour ramener seulement 4% des emplois disparus depuis 2000.
L’ex-candidat démocrate à la présidentielle Bernie Sanders s’est offusqué jeudi dans le Washington Post d’un « pansement qui ne fait qu’aggraver le problème des inégalités de revenus en Amérique« .
« A la place (du paiement) d’un impôt, l’entreprise va être récompensée par une réduction d’impôts. Wouah! (…) C’est ça punir les groupes qui ferment leurs usines aux Etats-Unis pour les déménager à l’étranger’« , se demande M. Sanders.
Le sénateur du Vermont craint en effet que cet accord n’incite désormais les entreprises à menacer de délocaliser leurs usines dans le seul but d’obtenir un allègement fiscal similaire.
Anthony Scaramucci, un chef d’entreprise membre de l’équipe de transition de M. Trump, a relevé mercredi que « tout l’objectif » de cette opération était de réduire les impôts des sociétés pour attirer les investissements aux Etats-Unis.
Pendant sa campagne, M. Trump a promis de relancer l’activité des entreprises grâce notamment à une vaste déréglementation et à une baisse de l’impôt sur les sociétés qui passerait de 35% à 15%.
Wilbur Ross – ‘Protectionnisme, c’est péjoratif’ –
Après l’Indiana, la tournée doit se poursuivre dans d’autres Etats industriels clés tombés dans son escarcelle comme l’Ohio (nord), où il doit tenir un meeting jeudi soir à Cincinnati.
Ces déplacements se tiennent au lendemain de la nomination de sa future équipe économique: un banquier de Wall Street, Steven Mnuchin, 53 ans, sera secrétaire au Trésor et Wilbur Ross, un milliardaire de 79 ans, secrétaire au Commerce.
Ils seront chargés de tenir la promesse de M. Trump de revenir sur les accords de libre-échange et de préserver les emplois industriels.
M. Trump a saisi l’opportunité de sa visite chez Carrier pour dénoncer encore une fois l’accord de libre-échange nord américain Aléna: « L’Aléna est une autoroute à sens unique vers le Mexique« .
M. Ross a déjà rejeté mercredi toute accusation de protectionnisme. « +Protectionnisme+ n’est pas un terme significatif, c’est péjoratif« , a-t-il contesté, estimant sur CNBC que les administrations précédentes avaient « fait beaucoup de commerce stupide et c’est ce que nous allons corriger« .