Zinsou contre Talon: le Bénin a voté dans le calme pour élire son nouveau président

Cotonou – Le Bénin a voté dimanche dans le calme pour choisir entre le Premier ministre sortant Lionel Zinsou et l’homme d’affaires Patrice Talon lors du second tour de l’élection présidentielle, dont les résultats officiels sont attendus dans une semaine.

Quelque 4,7 millions d’électeurs étaient appelés aux urnes dans les 7.908 bureaux de vote du pays pour élire le successeur de Thomas Boni Yayi. Celui-ci, au pouvoir depuis 2006, s’est retiré au terme de deux mandats, conformément à la Constitution de ce petit pays ouest-africain, premier État d’Afrique francophone à avoir entamé une transition démocratique au début des années 1990.

Contrairement au premier tour, où des « grandes tendances » ont pu être annoncées par la commission électorale dans les trois jours, il faudra cette fois attendre les résultats officiels publiés par la Cour constitutionnelle, qui « interviennent généralement une semaine après le scrutin« , a précisé Théodore Holo, le président de cette institution, à la presse.

Le banquier d’affaires franco-béninois Lionel Zinsou était arrivé en tête lors du premier tour, le 6 mars, suivi de près par le « roi du coton » Patrice Talon (27,11% contre 23,52%).

A Cotonou, favorable à M. Talon au premier tour, entre 200 et 300 militants ont crié victoire dimanche soir dans le quartier de Cadjehoun, près de la résidence de M. Boni Yayi, sous la surveillance d’une vingtaine de soldats.

« Tout s’est bien passé, rien de grave à signaler » à part quelques « tentatives de bourrages d’urnes » en cours de vérification, a déclaré à l’AFP le général Mathieu Boni, un des responsables d’une plateforme de la société civile qui avait déployé quelques milliers d’observateurs.

A l’école primaire Charles Guillot du quartier de Zongo, à Cotonou, de nombreux électeurs se sont massés en soirée autour des fenêtres des six bureaux de vote pour suivre religieusement le décompte des voix.

« Le moment du dépouillement est même plus important que le vote« , a estimé Martin Adjaho, un « zem » (conducteur de moto-taxi) venu s’assurer que « tout se passe bien« .

C’est dans ce quartier populaire de la capitale économique béninoise que M. Talon est venu voter peu avant midi, affichant un style décontracté, chemise blanche et lunettes de soleil.

Il était accompagné de Sébastien Ajavon, l’autre homme d’affaires candidat, troisième homme du premier tour où il a recueilli 22% des voix.

Outre M. Ajavon, M. Talon bénéficie du précieux soutien de 23 autres candidats du premier tour.

– ‘La rupture’ en Porsche –

Vêtu d’un ample boubou blanc et d’un petit chapeau, M. Zinsou a déposé son bulletin dans l’urne peu après 11H00 au collège Océan, dans le quartier Cocotiers de Cotonou.

M. Zinsou, 61 ans, est le candidat des Forces Cauris pour un Bénin Emergent (FCBE, au pouvoir), et a été adoubé par deux grands partis d’opposition, rassemblant derrière lui une grande majorité de députés de l’Assemblée nationale.

Ce soutien ne s’est pourtant pas traduit par un large succès. Il a devancé son principal rival d’à peine 100.000 voix.

Outre le chômage, notamment des jeunes, la corruption, la santé et l’éducation sont les principaux défis que devra relever le successeur du président Boni Yayi.

Peu diversifiée, l’économie de ce pays de 10,6 millions d’habitants s’appuie essentiellement sur l’agriculture et le commerce de transit et de réexportation vers son grand voisin et principal partenaire, le Nigeria.

Ancienne plume du Premier ministre socialiste français Laurent Fabius dans les années 1980, M. Zinsou a quitté son poste à la tête de PAI Partners, un des plus gros fonds d’investissement européens, pour devenir Premier ministre en juin 2015.

Il dit vouloir mettre à profit sa brillante carrière internationale et son gigantesque carnet d’adresses pour développer le Bénin. Mais ses détracteurs, qui le traitent de « yovo » (« Blanc« ), lui reprochent d’être « parachuté » par la France, l’ancienne puissance coloniale, pour raviver les réseaux de la « Françafrique« .

M. Talon, « self-made man » de 57 ans, qui s’est rendu aux urnes le 6 mars au volant de son coupé Porsche, tient à son image d’homme d’affaires prospère et dit incarner « la rupture« .

Entrepreneur incontournable au Bénin, contrôlant le secteur clé du coton et la gestion du port de Cotonou, Patrice Talon a financé les deux campagnes de M. Boni Yayi avant de devenir son ennemi numéro un.

Salah Abdeslam prétend qu’il devait se faire exploser au Stade de France

Les forces de police belges en pleine opération, ce vendredi à Molenbeek.

Les forces de police belges en pleine opération, ce vendredi à Molenbeek.

REUTERS/Francois Lenoir

Salah Abdeslam, le suspect-clé en fuite des attentats de Paris, a été arrêté ce vendredi, lors d’une opération policière à Molenbeek, en Belgique. « Après les sommations d’usage, l’assaut a été donné par la police », a décrit un élu local, sous couvert d’anonymat. Un homme « jeune, de petite taille à casquette, s’est enfui (…) Il a été touché par la police et emmené en ambulance », a-t-il ajouté. Blessé à la jambe, « l’ennemi public numéro un » a été transféré à l’hôpital Saint-Pierre de Bruxelles. L’un de ses complices a également été interpellé.

Lors d’une conférence de presse donnée avec le Premier ministre belge Charles Michel, François Hollande a déclaré qu’il s’attendait à ce que la Belgique extrade « le plus rapidement possible » Salah Abdeslam vers la France.

LIRE >> Fin de la cavale pour Salah Abdeslam, arrêté vivant

Mardi, les empreintes de Salah Abdeslam avaient été retrouvées dans l’appartement de Forest, près de Bruxelles, dont la perquisition avait tourné à la fusillade entre la police et trois hommes lourdement armés qui se planquaient dans l’habitation sans eau ni électricité.

L’un d’entre eux avait été tué: Mohamed Belkaïd, un Algérien, plus connu sous le faux nom de Samir Bouzid. Il avait notamment envoyé des fonds à la cousine d’Abdelhamid Abaaoud quelques jours après les attentats du 13 novembre. Deux autres avaient pris la fuite.

Fin de quatre mois de traque et de cavale

Salah Abdeslam, âgé de 26 ans et originaire de la commune bruxelloise populaire de Molenbeek, est soupçonné par les enquêteurs français d’avoir joué au moins un rôle-clé de logisticien dans ces attentats djihadistes qui ont fait 130 morts à Paris et Saint-Denis. Il s’est évaporé dans la nature depuis son exfiltration de Paris par des amis, au lendemain des attaques.

ENQUÊTE >> La cavale de Salah Abdeslam, au look de « toxicomane de Château-Rouge »

Un autre suspect reste recherché: Mohamed Abrini (30 ans), filmé le 11 novembre dans une station service sur l’autoroute entre Paris et Bruxelles en compagnie de Salah Abdeslam.

Le Bourse de Paris devrait digérer une série de réunions de banques centrales

Paris – La Bourse de Paris, comme l’ensemble des places européennes, devrait profiter d’une semaine écourtée avec peu de grands rendez-vous, pour digérer plusieurs réunions de banques centrales, dont celle de la BCE et de la Fed.

Les prochains jour s’annoncent d’autant plus calmes que les marchés semblent entrer dans une phase de digestion, après le ballet de rendez-vous monétaires et le récent rebond des indices, face à un agenda peu chargé en indicateurs de premier plan. La Bourse de Paris sera fermée vendredi pour un long week-end.

« Le marché est probablement entré dans une phase où il va digérer le rebond observé depuis le 11 février« , analyse Bertrand Lamielle, directeur de la gestion chez B*Capital (groupe BNP Paribas).

De son côté, Christopher Dembik, économiste chez Saxo Banque, prédit une poursuite de la volatilité, « dans un marché qui peine à trouver une direction« .

Après la réunion le 10 mars de la Banque centrale européenne (BCE), qui a décidé de sortir l’artillerie lourde pour relancer l’activité en zone euro, la réunion de la Réserve fédérale américaine (Fed) était la principale échéance attendue par les investisseurs ces derniers jours.

« Au cours des deux dernières semaines, les marchés ont eu les deux messages qu’ils attendaient de la part des banques centrales, les postures sont toujours les mêmes, globalement plutôt accommodantes« , souligne M. Lamielle.

La Fed a opté mercredi pour le statu quo et décidé de ne pas relever ses taux directeurs en invoquant les « risques » posés par la situation économique mondiale.

Mais les investisseurs ont réservé un accueil plutôt réservé à ces annonces. « Ce n’était pas une déception, mais il n’y avait pas de quoi sabrer le champagne non plus« , note encore M. Lamielle.

– Bonne tenue du pétrole –

La Fed « est apparue hésitante à propos de l’évolution future de la politique monétaire américaine, laissant la porte ouverte, au final, aussi bien à une hausse des taux qu’à une baisse éventuelle en cas de dégradation de la conjoncture« , analyse de son côté M. Dembik, évoquant « une ambiguïté qui a interpellé les investisseurs« .

La réunion de la Fed s’est intercalée entre celle de la Banque du Japon mardi et la banque d’Angleterre jeudi qui ont également marqué une pause dans leur offensive monétaire, traduisant ainsi leur frilosité face à un environnement économique incertain.

« Le seul point positif aujourd’hui pour le marché, c’est la très bonne tenue des prix du pétrole« , souligne M. Dembik.

Ceux-ci ont notamment profité des espoirs d’une baisse concertée de l’offre entre grands producteurs et seront une nouvelle fois surveillés, au cours d’une semaine écourtée, en raison d’une clôture des places boursières vendredi.

En zone euro, le marché sera attentif aux indices PMI sur l’activité manufacturière et dans le secteur des services.

En Angleterre, les investisseurs prendront connaissance des chiffres de l’inflation pour le mois de février alors qu’en Allemagne, les deux baromètres allemands les plus regardés sont au rendez-vous, l’Ifo, qui mesure le moral des entrepreneurs, et le ZEW, qui prend le pouls des acteurs de marché.

L’indice allemand partira d’ailleurs à nouveau à l’assaut des 10.000 points, seuil important qu’il a réussi brièvement à franchir cette semaine en séance, pour la première fois depuis mi-janvier.

Enfin, aux Etats-Unis, les ventes de logements neufs février ou encore le PIB final seront également suivis par le marché, alors que dans le même temps, différentes prises de paroles de responsables de la BCE et de la Fed viendront rythmer l’agenda.

Pour Bertrand Lamielle, ces indicateurs « ne sont pas de gros catalyseurs mais toute bonne nouvelle est à prendre car le marché a besoin de regagner de la confiance« .

Cac 40 (Euronext)

Migrants: tractations « compliquées » à Bruxelles pour un accord avec la Turquie

Bruxelles – Les dirigeants de l’UE s’attendaient à des tractations difficiles jeudi soir à Bruxelles, pour boucler un accord avec la Turquie censé stopper l’afflux de migrants vers l’Europe, malgré un « compromis » possible esquissé par des Chypriotes jusqu’alors très réticents.

Plusieurs Etats membres craignent une illégalité de la mesure phare du plan en négociation: le renvoi de tous les nouveaux migrants arrivant en Grèce depuis la Turquie, y compris les demandeurs d’asile. D’autres redoutent d’aller trop loin dans les contreparties promises à Ankara.

Le sommet réuni à Bruxelles n’a commencé à aborder la brûlante crise migratoire qu’en soirée, lors d’un dîner consacré à la quête d’une position unanime des dirigeants des pays de l’UE.

Ce n’est qu’avec cette position commune que le président du Conseil européen Donald Tusk pourra entamer au nom de l’UE des tractations finales avec le Premier ministre turc Ahmet Davutoglu, attendu à Bruxelles dans la nuit.

« Notre proposition est toujours sur la table« , a dit ce dernier à l’aéroport d’Ankara, avant de s’envoler pour Bruxelles. « Mais la Turquie ne deviendra jamais une prison à ciel ouvert pour les migrants« , a-t-il insisté.

« Je suis prudemment optimiste, mais pour parler franchement, je suis plus prudent qu’optimiste« , a résumé de son côté M. Tusk.

« Il y a encore des négociations compliquées« , a aussi reconnu la chancelière allemande Angela Merkel, qui a joué un rôle majeur dans les tractations avec la Turquie, quitte à agacer d’autres Etats membres.

Depuis le début l’année, plus de 143.000 personnes sont arrivées en Grèce via la Turquie, portant à plus d’un million les entrées en Grèce depuis janvier 2015 de migrants fuyant pour la plupart la Syrie en guerre, l’Irak et l’Afghanistan, selon le HCR.

Cet afflux, combiné avec la fermeture de la « Route des Balkans« , place la Grèce, et les milliers de migrants qui y sont bloqués, dans une situation intenable. Et accentue la pression pour que les Européens s’entendent avec la Turquie.

– ‘Très compliqué’ –

Les Européens ont été surpris de l’ampleur de la nouvelle « proposition turque » présentée lors du précédent sommet du 7 mars: Ankara est désormais disposé à reprendre tous les nouveaux migrants gagnant les îles grecques, y compris les demandeurs d’asile. Mais l’ONU a mis en garde contre l’illégalité de « possibles expulsions collectives et arbitraires » vers la Turquie.

Le projet « est très compliqué, sera difficile à mettre en oeuvre et se trouve à la limite du droit international« , a résumé jeudi la présidente lituanienne Dalia Grybauskaité.

La Commission européenne a assuré que tout accord respecterait le droit. Aux termes du pré-accord, les Européens s’engageraient, pour chaque Syrien renvoyé, à « réinstaller » dans l’UE un autre Syrien depuis la Turquie. Ce dispositif serait dans un premier temps plafonné à 72.000 places offertes en Europe.

En contrepartie, la Turquie obtiendrait une nouvelle aide substantielle de l’UE, qui pourrait jusqu’à doubler la promesse de trois milliards d’euros pour les 2,7 millions de réfugiés syriens accueillis sur le sol turc.

Ankara arracherait également une accélération du processus de libéralisation des visas pour ses ressortissants, ainsi qu’une relance de ses négociations d’adhésion à l’UE, bloquées par le contentieux historique avec Chypre.

Jusqu’alors inflexible contre la possibilité d’ouvrir rapidement de nouveaux chapitres de ces négociations, le président chypriote Nicos Anastasiades a toutefois entrouvert une porte jeudi, disant espérer « un compromis durant les délibérations qui vont suivre« .

– ‘Chantage’-

Alors que plusieurs pays de l’UE renâclent à s’entendre avec un pouvoir islamo-conservateur accusé de dérive autoritaire, le président Recep Tayyip Erdogan a réclamé mercredi la levée de l’immunité de parlementaires pro-kurdes.

Et le magazine allemand Der Spiegel a dénoncé jeudi une atteinte « à la liberté de la presse » après que son correspondant en Turquie a été contraint de quitter le pays, son accréditation n’ayant pas été renouvelée.

« Il n’est pas question de brader nos valeurs« , a prévenu le Premier ministre belge Charles Michel, refusant « une négociation qui ressemble parfois à une forme de chantage« .

En Grèce, où 850.000 personnes sont entrées par la Turquie l’an dernier, l’actrice Angelina Jolie a rencontré jeudi des réfugiés syriens sur l’île de Lesbos, où se trouvent actuellement quelque 4.800 migrants.

Tojours en Grèce, l’artiste chinois Ai Weiwei s’est fait symboliquement couper les cheveux par un Syrien à Idomeni, pour attirer l’attention sur les conditions précaires dans un camp situé à la frontière macédonienne.

Au moins 10.500 personnes continuent à y espérer une très hypothétique réouverture de la frontière avec la Macédoine, pour poursuivre leur route vers le nord de l’Europe.

La fermeture de la Route des Balkans fait aussi craindre l’ouverture de routes alternatives. Quatre Grecs et deux Irakiens, membres présumés d’un réseau de passeurs, ont été arrêtés en Grèce au moment où ils s’apprêtaient à faire passer en avion en Italie des migrants irakiens, a annoncé jeudi la police grecque.

« Le Parc des Princes? Ce sera sûrement mieux demain »

Dans un clip dévoilé jeudi, le rappeur Jazzy Bazz regrette l’ambiance du Parc des Princes, vidé de ses ultras depuis plusieurs années. C’était mieux avant? Abel, notre contributeur, est un fervent supporter du PSG. Il raconte.

Le dernier clip du rappeur Jazzy Bazz, Ultra parisien a été mis en ligne jeudi sur YouTube. Sur fond de couleur rouge et bleu, un message clair dans la bouche de ce supporter du PSG: le Parc des Princes, c’était mieux avant.

Dans les premières secondes de la vidéo, on voit des images de la construction de l’enceinte du club de la capitale, ce stade qui a vu tant de grands joueurs, de grands matchs par la suite. La mélodie très nostalgique, assemblée aux images des tifos [grandes banderoles, NDLR] de « l’ancien » Parc, me noue la gorge. En voyant ces images, remontent les souvenirs des premiers matchs auxquels j’ai assisté gamin.

« Ce parc nous manque à tous »

Mon premier match? PSG-Le Havre, offert par mon grand-frère le 15 janvier 2003. Lorsque je monte les marches, la température monte, le bruit est sourd, enfin, je vois la pelouse, les tribunes… J’ai 8 ans. Cette date restera à vie dans ma mémoire. Le but de la tête d’Aloisio, est anecdotique. Ce qui me marque, c’est le stade, son public, cette ferveur incroyable pour un club aux résultats si médiocres. Beaucoup de matchs ont suivi. Plus grand, j’ai commencé à aller seul au Parc. Comment ne pas se souvenir de cette ambiance incroyable le jour où le PSG a vaincu Saint-Etienne 3-0, ou la victoire contre le grand Lyon avec ce but de Giuly?

Ce parc nous manque à tous. C’était un endroit où tu pouvais crier ton amour debout sans qu’un fan de Zlatan ne te demande de t’asseoir. Mon amour pour ce club ne s’arrête heureusement pas aux tribunes. Il m’arrive de vibrer quand Pastore slalome et trompe Cech, ou quand Lucas humilie toute l’équipe marseillaise. Mais, souvent, je regarde la qualité de notre équipe, les résultats incroyables, et je me dis qu’avec les anciennes tribunes, ça aurait été incroyable! »

Les lois imposées par le club ne permettent plus de montrer sa ferveur

On a vu Raï pleurer, Ronaldinho nous remercier, Pauleta porté par la foule. On a l’impression que le stade est devenu passif, sans âme. Avant, les associations de supporters lançaient plus d’une dizaine de chants pendant un match. Jamais il n’y avait une minute de silence! Aujourd’hui, ce public « consommateur » regarde les parties en mangeant du pop-corn, et ne vit pas vraiment l’événement. En l’absence de cette ambiance, les joueurs ne semblent plus attachés au club, ne se rendent pas compte de l’importance et de la joie qu’ils amènent à des milliers de personnes. Est-ce de la faute des personnes présentes dans les tribunes? Non, car pour la plupart, ce sont les mêmes qu’avant. Seulement, les lois très strictes imposées par les patrons du club ne permettent plus de montrer sa ferveur.

Le public mérite-t-il vraiment de récupérer ce stade ? L’ambiance incroyable d’antan s’est malheureusement souvent accompagnée de violences. Le manque de courage (ou d’envie) des autorités de l’époque a fait qu’une poignée de personnes racistes venaient envenimer chaque match par leur haine, plutôt que par amour pour le foot. Je n’oublie pas les superbes souvenirs, mais je n’oublie pas non plus que mon frère craignait de m’emmener au Parc parce qu’il avait peur pour ma sécurité.

« Je n’oublie pas les cris de singes »

Je n’oublie pas les scènes de guerre avant le match PSG-OM de 2010. Impossible d’effacer de ma mémoire les cris de singe de certains aliénés. Comment peut-on plaider en faveur du retour des ultras alors qu’ils sont incapables de se gérer lorsqu’une fête est organisée au Trocadéro pour célébrer le titre de champion? En 2013, je suis allé fêté la victoire, je me suis retrouvé à courir dans les rues de Paris en évitant les ultras et les CRS.

Le Parc, c’était mieux avant? Et même si le Parc est dans le coma, je ne désespère pas qu’il revive un jour pour soutenir la plus grande équipe que le PSG n’ait jamais eu! Pour cela, il ne faut pas regarder en arrière mais essayer de regarder vers l’avenir. Le Parc, c’est comme le rap, c’était pas mieux avant, mais ce sera sûrement mieux demain.

Sécurité sociale: la leçon allemande de la Cour des comptes

La sécurité sociale est en déficit depuis 13 ans. Dans son rapport annuel, la Cour des comptes estime que la France devrait s’inspirer de l’exemple allemand pour repasser dans le vert..

La Sécurité sociale allemande? Bénéficiaire, à hauteur de 3,4 milliards d’euros en 2014. Son homologue française? Déficitaire, depuis treize ans. D’après le dernier rapport annuel de la Cour des comptes, la Sécu a encore creusé son trou de 13,2 milliards d’euros en 2014. Compte tenu de la croissance anémique, le retour à l’équilibre promis pour 2017 est repoussé à 2020, dans le meilleur des cas. La France a pris la mauvaise habitude de financer sa protection sociale à crédit. « Il s’agit là d’une anomalie profonde, dangereuse », selon le président de la Cour Didier Migaud. Le remède serait allemand. Explications.

L’hôpital français, trop cher

« Face aux enjeux du vieillissement et de l’extension des maladies chroniques, le système de santé reste trop centré sur l’hôpital », qui « représente 37% de la dépense », estime la Cour des comptes. Par exemple, l’hôpital prend en charge le traitement par dialyse de l’insuffisance rénale chronique. La Cour estime qu’il devrait se recentrer sur d’autres missions. L’hôpital « n’apporte pas aux patients d’avantage relatif justifiant des coûts élevés ». La Cour préconise la greffe de rein. Le coût annuel d’un patient greffé est de 14 700 euros, contre 65 091 euros pour un patient dialysé.

Mais l’hôpital français est surtout trop cher. Une dialyse revient à 62 000 euros en France, contre 40 000 en Allemagne pour une qualité de soins équivalente. L’hôpital allemand ne pèse que 29% dans la dépense totale de santé. Pourtant, les Allemands ne vont pas moins à l’hôpital que les Français, bien au contraire. Ils y effectuent plus de séjours (24 290 sorties d’hôpital pour 100 000 habitants contre 20 721 en France) d’une durée légèrement plus longue (9,3 jours contre 9,1 jours en France).

Pour expliquer cette différence de coût, la Cour incrimine des charges de personnel plus élevées dans notre pays, alors que l’hôpital allemand a externalisé certaines fonctions. Seconde explication, « les soins ambulatoires constituent une part significative de l’activité des hôpitaux français ». En Allemagne, ils sont confiés à la médecine de ville. Ainsi que les soins de suite et de réadaptation ou les soins de longue durée.

En Allemagne, le tiers-payant généralisé

Du côté de la médecine de ville, justement, la Cour retient aussi certaines particularités allemandes. Certes, les Allemands consultent deux fois plus leurs médecins que les Français. Les médecins gagnent mieux leur vie que leurs homologues français, mais leur rémunération est sévèrement encadrée pour ne pas faire déraper les dépenses. En effet, l’assurance-maladie allemande est tenue de respecter l’équilibre budgétaire dans le cadre d’un principe d' »auto-administration ». La limite budgétaire négociée chaque année par les médecins au sein de chaque Land doit être respectée.

Outre-Rhin, le tiers payant est généralisé, ce qui permet de contrôler l’activité des praticiens. Ils ne sont pas payés directement par leurs patients, mais par leurs associations professionnelles, qui leur attribuent individuellement des enveloppes de rémunération prélevées sur le budget régional. Contrairement à la France, oùles médecins peuvent prendre autant de patientsqu’ils veulent, les médecins allemands ne doivent pas dépasser un certain volume d’activité. Sinon, ils sont payés de façon dégressive.

Alors que les dépassements d’honoraires représentent 12% du volume total des honoraires en France, ils sont interdits en Allemagne pour les assurés affiliés à une caisse publique (89% des cas). Le système allemand impose « une responsabilisation financière des praticiens », note avec satisfaction la Cour des comptes. De ce fait, il a permis de contenir le volume de dépenses de médecine de ville, même s’il est plus important qu’en France.

Retraites: le rêve d’une caisse excédentaire

Des caisses de retraite excédentaires, la France n’y croit même plus. Entre 2000 et 2014, l’assurance vieillesse des salariés a réalisé un déficit de 65 milliards, tandis qu’elle était excédentaire de 16 milliards d’euros en Allemagne. Rien d’étonnant à cela, puisque les retraités français partent en moyenne deux ans plus tôt que les Allemands, et perçoivent un montant de pension de retraites supérieur de 8%. Circonstance aggravante, leur espérance de vie est plus élevée.

Quelle leçon en tire la Cour? Comme l’Allemagne donne la priorité à des « objectifs de compétitivité économique et d’équilibre financier », elle a procédé à des réformes plus radicales que la France, condamnée à remettre régulièrement son ouvrage sur le métier. « Les conditions d’âge de départ à la retraite à taux plein ont été plus fortement durcies dans le régime allemand que dans le régime français », remarque la Cour, en reconnaissant que la France rattrape son retard avec sa dernière réforme.

Notre système de retraite gagnerait cependant « à s’inscrire dans un mouvement d’adaptations en continu », estime la Cour. Mais les mécanismes d’ajustement qui permettent de garantir l’équilibre du système allemand ont un inconvénient: « Ils supposent d’être très attentifs à leurs conséquences éventuelles quand ils jouent sur la situation des retraités », note la Cour.

« La générosité, un choix social »

L’Allemagne, un exemple à suivre? « La France a un problème spécifique en matière de santé, reconnaît pour L’Express l’économiste Henri Sterdyniak. Les dépenses augmentent un peu vite. » Limiter les recettes des professionnels, quand elles augmentent sans raison apparente, est « une piste qu’on peut suivre », reconnaît-il.

Mais le spécialiste de politique sociale à l’OFCE a toutefois une autre interprétation que la Cour des comptes sur le déficit français comparé à l’excédent allemand: « Il est entièrement dû à la différence de situation économique! Il manque 6 points de PIB à la France, cela représente 30 milliards de cotisations sociales en moins. » Un déficit en grande partie conjoncturel? Effectivement, la Cour des comptes décompose le déficit 2014 en une part structurelle de 3,7 milliards, moins élevée que sa part conjoncturelle de 9,5 milliards.

En ce qui concerne les retraites, en revanche, l’économiste réfute l’hypothèse que la France aurait des leçons à recevoir de l’Allemagne: « Les Allemands sont moins généreux que nous sur la retraite, mais la générosité est un choix social », estime-t-il. Encore faut-il pouvoir se le payer.

Lise, bipolaire: « Les autres ne peuvent pas soupçonner ma face cachée »

Lise, co-fondatrice du site Tendances de Mode, a souffert d’anorexie avant d’être diagnostiquée bipolaire en 2010. Aujourd’hui, à 32 ans et après plusieurs traitements, elle mesure le chemin parcouru.

J’ai vécu mon enfance dans une sorte de maison enchantée. Avec mes cinq soeurs et mon frère -je suis la quatrième-, nous formions une grande fratrie. Mon père était kiné, ma mère prof d’Histoire, puis elle s’est arrêtée de travailler pour nous élever. Nous vivions dans un petit village du Nord-Pas-de-Calais. J’étais une enfant pleine de vie et d’imagination. Nous étions très libres, un peu coupés du monde. Notre grand-père paternel vivait avec nous. Il dégageait une force tranquille qui m’apaisait.

Quand il est décédé, à 92 ans, j’avais 11 ans. Du jour au lendemain, toutes les forces de la maison ont été chamboulées. Mon père est devenu le chef de famille, mais ça n’était pas la même chose. Au collège, ça se passait moyen. J’étais vue comme une enfant turbulente, dissipée. Je ne comprenais pas pourquoi il y avait des règles. Je ne travaillais pas.

« Je me sentais extérieure à mon propre corps »

A 14 ans, en troisième, je suis sortie avec mon premier petit ami: Julien [son futur mari]. J’étais très amoureuse, mais on s’est séparés à la fin de l’année scolaire: je ne le trouvais pas assez entreprenant. En seconde, je suis partie en pension à Lille, dans un lycée qui proposait des cours de théâtre. Là, je suis tombée amoureuse d’un surveillant, Thomas*. A la fin de l’été, il m’a quittée pour quelqu’un d’autre. Cette rupture m’a brisée. Peu à peu, je me suis mise à manger moins. Je me disais: « Il ne t’a pas aimée, toi, donc maintenant il faut que tu deviennes quelqu’un d’autre. » J’ai fait trois lycées en quatre ans. Je sortais avec plein de mecs mais je ne ressentais plus rien. Je me sentais extérieure à mon propre corps.

En terminale, je suis devenue hyper anorexique. Je travaillais à fond, ça allait avec mon nouveau désir de perfection. J’avais des super notes. J’ai décroché mon Bac L, option théâtre, avec la mention Bien.

Avant d’entamer des études de droit -je souhaitais devenir commissaire-priseur-, je suis partie seule en vacances en Égypte avec mon père. Au cours de ce séjour, trois personnes sont spontanément venues me voir pour me parler de ma maladie. Ca m’a permis de mieux prendre conscience de ce qui m’arrivait. Ces vacances très douces constituent un moment charnière dans ma vie: j’avais mon père pour moi toute seule, à mon écoute, et la nourriture m’était servie dans un cadre nouveau, différent, agréable.

« J’avais l’impression que je n’étais pas montrable »

A mon retour, j’ai réintroduit plein de choses dans mon alimentation. J’ai fait deux mois de droit, puis j’ai réalisé que j’avais plutôt envie de faire de la mode. J’ai intégré Esmod à Roubaix, mais les cours ne m’intéressaient pas. Seule la troisième année d’école, centrée sur les costumes de scène, à Paris, m’a intéressée, mais je n’allais en cours qu’un jour sur deux. La moitié du temps, j’avais l’impression que je n’étais pas montrable. J’ai eu mon diplôme -ça n’était pas très dur- puis je suis partie aux Etats-Unis, à Philadelphie, en tant que jeune fille au pair, pour améliorer mon anglais. J’étais dans une famille francophone, en banlieue. Si j’avais été en France ça aurait été pareil, sauf que là, il y avait plus de bouffe. Je suis devenue boulimique. J’ai pris 15kg en six mois.

A mon retour, je ne rentrais plus dans mes fringues. Or j’avais besoin d’un boulot. Je me suis donné six mois pour retrouver un corps qui me permettrait de me sentir à nouveau montrable. Je me suis lancée dans un régime super strict, mais comme je n’étais plus anorexique, tous les trois jours, je craquais, m’enfonçant dans un cercle vicieux. J’ai quand même perdu du poids car je faisais beaucoup de sport. Au bout de six mois, je m’étais délestée de 12kg. Je me trouvais toujours moche, mais je pouvais chercher un boulot.

J’ai décroché un entretien à Lyon, chez Z, l’enseigne pour enfants. Au même moment, Julien m’a appelée. Il habitait Paris. On s’est revus et on est retombés amoureux. J’ai eu le poste, mais Julien préférait que je m’installe avec lui à Paris. J’ai accepté. J’avais 23 ans. Au bout de six mois, il m’a demandé de l’épouser. On s’est mariés, puis on a décidé de créer une marque de fringues pour enfants, Les petits zigotos. On s’est installés à Honfleur.

« Mon humeur jouait à la roulette russe »

Peu à peu, je me suis rendu compte que j’avais des accès de violence. Il m’arrivait même d’avoir envie de taper Julien. J’ai alors eu une grosse prise de conscience: alors que jusque-là, je croyais que je n’allais pas bien parce que ma vie n’était pas celle que je voulais, là, j’étais amoureuse, d’un homme qui m’aimait, je n’étais plus chez mes parents, j’exerçais un métier qui m’intéressait, bref sur le papier tout allait bien, et pourtant ça n’allait toujours pas. J’étais prise d’angoisses énormes quand quelqu’un m’invitait à dîner. Chaque matin, mon humeur jouait à la roulette russe. Je pleurais sous ma douche. Quand ça n’allait pas, je restais prostrée dans mon lit, émettant des envies de changements drastiques.

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Au début, Julien a pris ce que je disais pour argent comptant, essayant de trouver des solutions à tout. Au bout de six mois, il a compris qu’il y avait un problème. Je suis allée voir une psy à Deauville. Elle m’a prescrit de l’Effexor, un antidépresseur. Les pulsions de violence ont disparu, mais ma vie ne s’est pas vraiment améliorée. D’autant moins qu’au même moment, notre marque s’est cassé la figure.

En 2007, on a lancé notre site, Tendances de Mode. Au début, j’y écrivais trois articles par jour, tandis que Julien s’occupait de l’aspect technique et du référencement. C’était assez prenant. Au bout d’un moment, on a pu en vivre, mais au départ, ça n’était pas le cas. Au quotidien, la nourriture était un sujet compliqué. On ne mangeait pas la même chose. Julien ne pouvait rien me dire, j’étais ultra susceptible. Le moindre temps de réponse pouvait me rendre folle si je sentais une micro fissure dans son regard sur moi. Je faisais deux heures de sport par jour pour compenser mes pics de compulsions.

« On s’aimait d’un amour fusionnel, mais ça ne m’empêchait pas d’avoir régulièrement envie de sauter par la fenêtre »

C’était dur, pour l’un comme pour l’autre. On s’aimait d’un amour fusionnel, mais ça ne m’empêchait pas d’avoir régulièrement envie de sauter par la fenêtre. Je n’étais pas fiable: souvent, j’avais envie d’aller à un rendez-vous, mais il m’était physiquement impossible de m’y rendre. Des amis sont partis, lassés de mon inconstance. Cette alternance de moments d’euphorie et de déprime restaient très cachée: même ma famille n’en savait rien. En cela, c’était très différent de l’anorexie, qu’on ne peut pas ne pas voir et qui désarçonne tout le monde.

En 2010, nous avons emménagé à Paris. Sur un coup de tête, j’ai arrêté mon traitement. On s’est retrouvés aux urgences de Sainte Anne. Là, pour la première fois, une psychiatre m’a dit que j’avais des troubles de l’humeur. Elle m’a prescrit de la Depamide, un antiépileptique qui ne me soignait qu’à 30%. Je suis allée la voir toutes les semaines, mais je n’avais pas l’impression d’avancer. Elle me disait que le médicament n’aurait de l’effet qu’au bout d’un an. Six mois plus tard, elle m’a diagnostiquée bipolaire. Tout ça n’en restait pas moins flou.

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Peu après, avec Julien, nous avons décidé de partir nous installer à Vancouver. C’est l’avantage avec notre site: une connexion Internet nous suffit pour pouvoir travailler. Nous avions envie de faire un bébé. Là-bas, j’ai fait la connaissance d’une psychiatre très douce. Je lui ai parlé de mon envie d’enfant. Pour cela, il fallait que je change de traitement. Elle m’a proposé de passer au Xeroquel, un médicament révolutionnaire avec lequel je pouvais être enceinte.

Vancouver s’est révélé un cadre de vie très agréable. Peu à peu, mon corps s’est affiné. Pas parce que j’étais au régime mais parce qu’on faisait tout à pied. Au bout d’un an, j’avais l’impression d’être guérie tant mon énergie était devenue stable.

Je suis tombée enceinte. Chaque matin, j’avais la trouille que les choses changent, mais non, je continuais de bien aller. Et puis la fin de notre visa est arrivée. Je voulais accoucher au Canada pour permettre à notre enfant d’avoir la double nationalité, mais ça n’était pas possible. On est rentrés à Paris.

« Je pensais aussi que la maternité allait me faire devenir adulte »

Là, jusqu’à l’accouchement, tout s’est bien déroulé. Je me sentais fière de mon nouvel équilibre. A la naissance de Charles, je n’ai pas souffert. J’ai vécu l’accouchement comme quelque chose d’irréel. Avec le recul, je crois que j’aurais aimé que ça se passe autrement, que je ressente les choses plus intensément afin d’éprouver véritablement une sorte de passage. Je m’attendais à ce qu’une relation sacrée s’établisse immédiatement avec mon enfant, mais ça ne fut pas le cas. Je l’aimais, mais je ne ressentais aucun déversement d’amour. J’étais juste moi, avec un enfant. Je pensais aussi que la maternité allait me faire devenir adulte, me faire devenir femme. Ça ne fut pas le cas non plus. J’étais désarçonnée. Je pensais enfin pouvoir entrer dans une case, mais ça ne marchait pas comme ça.

Je n’ai pas pris de congé maternité. Julien et moi nous sommes occupés de Charles à tour de rôle. Assez vite, le sommeil haché et la fatigue ont fait ressurgir certains troubles. Les phases de mélancolie et d’angoisse sont revenues. Au bout de six mois, nous avons pu faire garder Charles, mais les oscillations n’ont fait qu’aller en s’empirant, jusqu’à ce que je retrouve tous les symptômes de ma bipolarité.

Cette maladie s’avère très différente d’une personne à l’autre. Certaines peuvent avoir des phases up ou down de plusieurs mois. Moi, à ce moment, j’avais plutôt deux jours bien, puis trois jours pas bien. Pas bien, « en bas », ça veut dire plein d’angoisses vis à vis du quotidien, la peur de ne pas y arriver, se sentir affreuse. Avoir l’impression que tout va s’effondrer, que rien n’est stable, que Julien va me quitter parce qu’il ne m’aime plus, que tout ce que je fais c’est de la merde. Des accès de boulimie, l’énergie à zéro, l’arrêt du sport. L’impossibilité de voir quelqu’un, de sortir de la maison. Avec le temps, j’ai appris à ne pas trop parler pendant ces périodes, tant je sais que ce que je pense alors est généré par des angoisses sans lien avec la réalité.

« Les gens prennent mes baisses de moral pour un manque de volonté »

Les périodes de « haut », au contraire, sont des moments de grande excitation. Je fais beaucoup de sport, mon alimentation est réduite, j’ai l’impression très agréable que je peux tout faire. Je fais plein de projets, je suis très positive. Je prends des rendez-vous, j’ai envie de voir plein de gens. Avec les autres, je suis excessivement joyeuse, enthousiaste, gentille. Les gens m’aiment beaucoup, trouvent que je vais bien. Ils ne peuvent pas soupçonner ma face cachée. Quand je leur dis, ils ont même du mal à me croire. Ils prennent mes baisses de moral pour un manque de volonté.

C’est le drame de la bipolarité: les mots qu’on utilise pour définir notre état sont les mêmes que ceux des gens normaux. Du coup, ils ne comprennent pas pourquoi, quand ça ne va pas, on n’arrive pas à se remettre en selle. Un jour, alors que je n’étais pas encore maman, l’une de mes soeurs m’a dit: « Une fois que tu auras un enfant et que tu habiteras ailleurs, ça ira mieux. » Or ça n’était pas mon environnement qui pouvait changer quelque chose à mon état. On a déménagé plusieurs fois, ça n’a jamais rien résolu.

En 2012, six mois après la naissance de Charles, je savais qu’il fallait que je revoie quelqu’un. A cause de mes oscillations d’humeur, mais aussi en raison de cauchemars récurrents. Une amie m’a conseillé une psychanalyste. La première séance s’est révélée magique. Elle m’a permis de mettre plein de choses en relation. Les séances suivantes furent moins spectaculaires, avec des ressentis aléatoires. Cette psychanalyste m’a par ailleurs indiqué un psychiatre, afin de me faire prescrire des médicaments.

J’ai tout de suite été en confiance avec ce psychiatre. Il m’a appris qu’il était normal que le Xeroquel, que je prenais depuis le Canada, ne fasse plus d’effet car c’est un médicament dont l’efficacité décroit avec le temps. Il avait envie de tenter le lithium. J’avais peur que ça me fasse grossir. Il m’a proposé d’essayer: avec le lithium, au bout de trois semaines on sait si on va grossir ou pas. J’étais tellement mal que j’ai accepté.

« J’ai l’impression d’entrer dans une nouvelle normalité, un peu grise »

Aujourd’hui, j’en suis à six mois de traitement au lithium. Ça a un peu augmenté mon appétit, mais je n’ai pas vraiment pris de poids. On attend d’avoir trouvé la juste dose pour supprimer Effexor et Xeroquel. Ça va mieux. Il n’y a quasiment plus de jours où je me retrouve dans l’incapacité de travailler. Mes moments de down sont plus courts, moins intenses. En revanche, globalement, je me sens un peu plus froide dans mon rapport aux autres. Un peu plus indifférente. J’ai arrêté d’aller discuter avec les mendiants dans la rue par exemple, chose que je faisais régulièrement avant.

J’ai l’impression d’entrer dans une nouvelle normalité, un peu grise. Je n’ai plus de phases up. Ces moments de surcroît d’énergie me manquent. Jusque-là, j’ai toujours pu compter sur des périodes de trois jours au cours desquelles je faisais plein de choses sans efforts. Quand j’ai dit ça à mon psychiatre, il m’a répondu: « Bienvenue dans la vie réelle. »

Moi, dans l’absolu, j’aurais voulu conserver mes phases hautes et ne plus avoir de phases basses. Un peu comme quelqu’un qui prend de la drogue. Mais c’est le contraire qui s’est produit.

Depuis quelques mois, j’ai l’impression de découvrir la vie comme tout le monde la voit. Sans filtre Instagram alors qu’avant, j’en avais plein. Cette capacité à m’émerveiller s’est estompée alors que je croyais qu’elle faisait partie de moi. Je me rends compte aujourd’hui que cette « extra-sensibilité » devait faire partie de mes troubles bipolaires.

« Je suis désormais capable de me demander ce que je veux au fond de moi »

Malgré cela, je ne veux pas croire que la vie réelle est moins sympa que la vie de bipolaire. J’apprécie par exemple d’avoir des phases up & down moins marquées, car cela m’aide à mieux me connaître. Avec la bipolarité, vous êtes tellement instable que vous avez du mal à savoir ce que vous pensez vraiment. Je suis désormais capable de me demander ce que je veux au fond de moi, en tant que femme, épouse, maman, en termes de projets et d’idéal de vie.

Je commence seulement à avoir certaines réponses, et ces réponses ne me plaisent pas forcément, notamment dans mon rapport aux gens. Je me découvre par exemple moins généreuse que ce que je croyais. Je sais que j’aime les autres, mais auparavant, cette générosité était exagérée. Il faut que je replace tous les curseurs, dont beaucoup étaient très hauts.

C’est aussi déstabilisant pour les autres. Je crains particulièrement que Julien n’aime pas la nouvelle Lise, qu’il la trouve moins drôle, moins surprenante. Mais au fur et à mesure, je me rends compte que ça va et que lui-même s’est apaisé. C’est moins les montagnes russes, et le fait que j’aille mieux l’autorise à plus de vulnérabilité. Les rôles s’inversent. Ça fait du bien.

*Le prénom a été changé.

Par Lise, propos recueillis par Géraldine Dormoy

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Gaza: deux enfants tués dans un raid israélien nocturne

Gaza (Territoires palestiniens) – Une fillette palestinienne de six ans et son frère de dix ans ont péri dans un raid aérien israélien mené samedi avant l’aube dans la bande de Gaza en représailles à des tirs de roquettes sur Israël, selon des sources médicales.

« Israa Abou Khoussa, six ans, a succombé après avoir été grièvement blessée lors d’un raid sur le village de Beit Lahiya dans le nord de la bande de Gaza, dans lequel son frère Yassine, dix ans, a été tué » sur le coup, ont affirmé les sources médicales palestiniennes.

Vendredi soir, l’armée israélienne a annoncé que des roquettes avaient été tirées depuis l’enclave palestinienne vers Israël, sans faire de victime.

Comme après chaque tir similaire, l’aviation israélienne a riposté et mené avant l’aube quatre raids contre des bases de la branche armée du mouvement islamiste Hamas, au pouvoir à Gaza.

« En réaction à l’agression, l’armée de l’air a frappé quatre sites du Hamas dans le nord de la bande de Gaza« , a indiqué l’armée dans un communiqué.

La maison de la famille Abou Khoussa, dont un troisième enfant de 13 ans a également été blessé, se trouve à proximité de l’une des bases des brigades Ezzedine Al-Qassam. Les raids ont provoqué d’importants dégâts.

Dans l’après-midi, des centaines de personnes ont participé aux funérailles du jeune Yassine, ont constaté des journalistes de l’AFP.

Des groupes se revendiquant de l’idéologie de l’organisation jihadiste Etat islamique ont revendiqué plusieurs tirs de roquettes sur Israël, une trentaine en un an et demi. Mais invariablement Israël mène les raids de représailles sur des sites appartenant au Hamas, qu’il considère comme unique responsable de la sécurité dans la bande de Gaza.

Ismaïl Radouane, un haut cadre du Hamas, a dénoncé les raids israéliens, y voyant « une escalade » dont il a fait porter « l’entière responsabilité » à l’Etat hébreu.