Entre révélations, démentis et approximations, difficile de suivre les rebondissements de l’affaire Fillon et des soupçons d’emploi fictif contre son épouse, Penelope Fillon. L’Express vous aide.
Depuis mercredi dernier, François Fillon est au coeur d’une tempête judiciaire et médiatique: il est soupçonné d’avoir fourni un emploi fictif d’attachée parlementaire à sa femme Penelope sur plusieurs années, mais d’avoir aussi fait travailler ses enfants. En parallèle, d’autres affaires commencent à sortir. L’Express rembobine le fil de l’histoire.
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Acte 1. Les révélations choc du Canard enchaîné
Mardi soir, le Canard enchaîné révèle que la femme de François Fillon, Penelope, a été rémunérée près de 10 ans comme attachée parlementaire de son mari, puis du suppléant de celui-ci, mais aussi par la Revue des deux mondes, propriété d’un ami du candidat. Pour un montant global de 500 000 euros.
Si un parlementaire peut tout à fait embaucher un proche, l’hebdomadaire satirique, témoignages à l’appui, met en doute la réalité du travail effectué par l’épouse de l’ancien Premier ministre. L’accusation est rude pour François Fillon, et les soupçons viennent entacher son image d’homme irréprochable qu’il a façonnée.
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Le cas de la Revue des Deux Mondes est éloquent. Entre 2011 et 2014, la revue n’employait qu’une personne, pour un salaire annuel de 12 719 euros. Selon les informations de L’Express, cette somme passe à 58 453 euros en 2013 et 72 427 euros en 2013, en raison de l’embauche de Penelope Fillon. Or, sur cette période, l’épouse de l’ancien Premier ministre n’a publié que deux notes de lecture.
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Acte 2. L’opération transparence un peu ratée de Fillon
Après une première réaction a minima où il parle d’attaques « misogynes » et des déclarations contradictoires et très peu convaincantes de ses lieutenants dans différents médias, François Fillon reprend les choses au main et s’invite au 20 h de TF1 le jeudi. Il dénonce les calomnies et affirme que sa femme a fourni un travail « quotidien et réel » comme attachée parlementaire.
Pour déminer le terrain, et éviter une nouvelle polémique, il révèle avoir rémunéré deux de ses enfants « qui étaient avocats » lors de son mandat de sénateur, entre 2005 et 2007. Problème, Marie et Charles Fillon n’étaient pas, à l’époque, encore diplômés. Ils ont respectivement prêté serment fin 2007 et en 2010.
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François Fillon voulait jouer la carte de la transparence? Raté, il s’embourbe un peu plus et force son entourage à voler à son secours. « [Concernant ses enfants], c’est une imprécision de langage, explique rapidement un proche qui précise que François Fillon voulait dire que ses enfants ‘sont avocats’ aujourd’hui, et non pas qu’il l’étaient à l’époque. » Une nuance, et de taille.
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Acte 3. Les révélations de Mediapart
« Les emmerdes, ça vole toujours en escadrille », avait coutume de dire Jacques Chirac. François Fillon ne peut qu’acquiescer. Samedi, Mediapart révèle que l’ancien sénateur a perçu une partie des crédits réservés à la rémunération d’assistants lors de son passage au Sénat, entre 2005 et 2007, grâce à un système de commissions occultes.
Le lendemain, le JDD en rajoute une couche. Et précise que l’ex-sénateur « a perçu sept chèques à son nom » pour « un montant total de l’ordre de 21 000 euros » correspondant à des « reliquats de crédits d’assistants ». Une enquête est actuellement en cours sur ce dossier.
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Acte 4. La nouvelle contre-attaque de Fillon à la Villette
Il s’agit pour François Fillon d’éteindre l’incendie et de relancer sa campagne avec son premier gros meeting à La Villette. Devant son épouse, installée au premier rang, François Fillon défend son image d’homme vertueux. Il déclare à nouveau sa flamme à Penelope et s’en prend à ceux « qui ont voulu [les] jeter aux loups ». Mais l’ancien Premier ministre commet un nouvel impair.
Pour faire preuve de transparence, il affirme ne posséder qu’un seul compte bancaire, à Sablé-sur-Sarthe. Problème: l’Assemblée nationale en exige au moins deux pour les députés. L’équipe de François Fillon est de nouveau obligé de corriger le candidat et précise, notamment auprès de Libération, qu’il possède « deux comptes », mais « dans une seule banque ». Un nouveau flou qui vient fragiliser ses explications.
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Acte 5. Les auditions, les perquisitions et les questions
Lundi soir, le candidat à l’élection présidentielle et sa femme ont été entendus séparément par les enquêteurs anticorruption. Après 5 heures d’audition, ils ont affirmé avoir « apporté des éléments utiles » à la justice, sans préciser la nature des-dits éléments. Antonin Lévy, l’avocat de François Fillon, a même expliqué que la nature des activités de Penelope Fillon n’était pas forcément « tangible ».
Mardi matin, l’enquête a franchi une nouvelle étape et une perquisition a eu lieu dans le bureau de François Fillon à l’Assemblée nationale. Les premiers éléments mis au jour ne plaident pas en faveur de la défense du couple: d’après BFM TV, Penelope Fillon ne se souvient pas avoir signé de contrat de travail et les fiches de paie correspondant à son travail auprès du suppléant de Marc Joulaud « manquent ».
Acte 6. La facture s’alourdit
Dans son édition de mercredi, le Canard Enchaîné dégaine une nouvelle salve de révélations. Selon l’hebdomadaire, Penelope Fillon aurait touché au total plus de 900 000 euros brut comme collaboratrice de son mari, de son suppléant et à la Revue des Deux Mondes. Et la période incriminée s’étend: il ne s’agit plus de 1998 à 2012 mais aussi des années 1988 à 1990 puis l’année 2013.
Par ailleurs, le candidat de la droite à la présidentielle aurait rémunéré deux de ses enfants comme assistants parlementaires quand il était sénateur de la Sarthe entre 2005 et 2007, pour une somme cumulée de 84 000 euros. Et non pas pour des missions « ponctuelles » et « précises », comme il avait tenté de déminer au 20 heures de TF1.
Acte 7. Soupçon d’emploi fictif sur un « pilier de l’équipe Fillon »
Selon Mediapart, le propriétaire de La Revue des deux Mondes, Marc Ladreit de Lacharrière, aurait rémunéré une personne chargée de la campagne numérique du candidat Les Républicains. Il s’agit d’Alexia Demirdjian, qui aurait oeuvré de mars 2015 à mars 2016 en tant que « chargée de mission » de la Fondation Culture et Diversité, une structure appartenant au milliardaire.
Problème d’après Mediapart: Alexia Demirdjian, dont l’implication dans la campagne de François Fillon est officielle depuis mars 2015, n’aurait laissé aucune trace publique de son travail à la fondation.
Acte 8. Des activités de conseil bien mystérieuses
Depuis plusieurs semaines, sa société de conseil, 2F Conseil, est dans l’oeil de la presse. Pour l’instant, rien de délictueux n’a été rapporté mais plusieurs éléments interrogent. Si la loi interdit à un député de créer une société de conseil, François Fillon a profité de la fenêtre de tir d’un gros mois entre son départ de Matignon, en mai 2012 et son élection à l’Assemblée en juin pour créer sa structure.
En revanche, il refuse depuis le début de révéler qui sont ses les clients de cette structure qui, révèle Le Monde ce mercredi, lui a permis d’empocher 757 526 euros entre 2012 et 2015. Le candidat écolo à la présidentielleYannick Jadot, sans apporter de preuve, a attaqué sur le sujet: « Il aurait travaillé pour des société russes. On comprendrait alors la complaisance vis-à-vis de Vladimir Poutine. »
Mediapart et Le Monde révèlent ce mercredi une affaire dans l’affaire, en expliquant qu’un des clients de la société est le cabinet Ricol Lasteyrie Corporate Finance, fondé par René Ricol, un ancien conseiller de Nicolas Sarkozy. Libération s’interroge sur l’utilisation de fonds obtenus via cette société puisque les comptes du couple « pèse[nt] une cinquantaine de milliers d’euros ».
Acte 9. De nouvelles révélations
Pour quelles raisons Marc Ladreit de Lacharrière, patron de Fimalac et proche du candidat, a-t-il fait travailler Penelope Fillon à La Revue des Deux Mondes? Les journalistes du Monde Gérard Davet et Fabrice Lhomme se sont penchés sur la question dans une enquête. L’homme d’affaires a été décoré de la grand-croix de la Légion d’honneur le 31 décembre 2010 par Nicolas Sarkozy, sur recommandation de François Fillon, l’année précédant l’embauche de Penelope Fillon.
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Par ailleurs, selon les journalistes, le candidat aurait expliqué aux enquêteurs du parquet national financier que ses enfants, rémunérés comme assistants parlementaires à l’époque où il était sénateur, auraient collaboré à des projets ayant peu de rapports avec la circonscription de la Sarthe. Sa fille, Marie Fillon, l’aurait aidé à écrire son livre La France peut supporter la vérité, publié en 2006. Son fils Charles, lui, aurait été rémunéré pour participer à la campagne de Nicolas Sarkozy en 2007. Une pratique illégale (si elle est confirmée) pour un collaborateur parlementaire.